Pour la première fois, deux jeunes chercheurs de l’Observatoire Astronomique de Strasbourg ont créé une intelligence artificielle pour estimer les propriétés des amas globulaires observés dans les galaxies, y compris dans la Voie Lactée.
Les amas globulaires sont des regroupements d’une dizaine de milliers à plusieurs millions d’étoiles qui se présentent sous la forme de boules compactes liées par la force de gravitation. Ces amas d’étoiles sont parmi les plus vieux objets rencontrés dans l’Univers, et ils ont survécu à 13 milliards d’années d’évolution. C’est pourquoi l’étude de ces objets est d’une importance capitale pour comprendre la formation et l’histoire des galaxies. L’obtention d’une estimation précise de leurs propriétés permettra à la communauté scientifique d’échafauder des scenarii de plus en plus précis quand au passé de notre Voie Lactée et des autres galaxies lointaines. Environ 160 amas globulaires sont observés dans notre galaxie mais il est très difficile d’estimer leurs propriétés en détails. Le problème est que ces systèmes sont très âgés et qu’ils ont donc subi une longue évolution dynamique ainsi qu’une longue évolution stellaire. Pour cette raison, plusieurs étoiles au sein des amas ont eu le temps de s’échapper ou d’arriver en fin de vie, par exemple en se transformant en trous noirs, ce qui les rend indétectables à l’observation. Par conséquent, l’obtention de bonnes contraintes sur les propriétés des amas (par exemple, leur masse, leur âge ou leur distance par rapport à la Terre) s’avère compliqué: à ce jour, cela nécessite le développement de modèles dynamiques très élaborés et demande un temps de calcul conséquent.
En vue de pallier ce problème, les deux chercheurs Strasbourgeois ont mis au point l’algorithme « π-DOC » (Predicting Images for the Dynamics Of stellar Clusters). Dans un article à paraître dans la revue “Monthly Notices of the Royal Astronomical Society”, ils ont montré que les réseaux de neurones à convolution permettent de retrouver la distance, l’âge et la masse de ces objets, en utilisant comme seule entrée l’image des amas (leur « carte de luminosité »). Pour entraîner leur algorithme ils ont utilisé des simulations numériques de la formation des ces objets afin de générer de « fausses » observations de leur carte de lumière telle qu’elles seraient observées par un vrai télescope. Une fois entrainé, π-DOC prédit, presque instantanément, les propriétés des amas avec une faible erreur comparable aux meilleurs modèles existants à l’heure actuelle (Figure 1).
Mieux, une première application de π-DOC à des observations a montré que l’algorithme donne déjà de bonnes estimations sur les vraies données astronomiques (Figure 2).
Ce travail considérable est rendu possible grâce à l’un des plus grands supercalculateurs de France, Jean-Zay (GENCI), auquel les deux chercheurs ont accès pour développer leur projet. A terme, ils ont pour vocation d’entrainer leur algorithme sur un jeu de simulations plus étendu afin de lui montrer plus d’exemples qui ressemblent à la réalité. Ainsi, l’algorithme devrait retrouver très rapidement et avec une précision inégalée les propriétés de tous les amas déjà connus et il permettra d’obtenir de manière systématique la « carte d’identité » des nouveaux amas observés par les futures générations de télescopes.
Contact :
Jonathan CHARDIN: jonathan.chardin@astro.unistra.fr
Paolo BIANCHINI: paolo.bianchini@astro.unistra.fr